Plus de 30 ans après l’adoption de la loi du 5 juillet 1985 sur l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, la notion cardinale d’implication continue d’interroger les juridictions comme le démontre un arrêt rendu le 26 octobre 2017 par la 2e chambre civile de la Cour de cassation (n°16-22.462).
Comme cela l’a été plusieurs fois rappelé, la victime d’un accident de la circulation, pour être indemnisé doit rapporter la preuve de 4 conditions, soit la présence d’un véhicule terrestre à moteur, un accident de la circulation, l’implication d’un véhicule dans cet accident et l’imputabilité du dommage à cet accident.
Le législateur exige donc non pas que le véhicule soit la cause de l’accident mais simplement qu’il y soit impliqué.
Cette notion, unique en droit de la responsabilité et inconnue des professionnels du droit, a inévitablement conduit à des appréciations diverses et variés, les avocats comme les magistrats faisant montre de trésors d’imaginations pour la retenir ou pour l’exclure.
La Cour de cassation, dans son œuvre d’harmonisation, a tout d’abord et rapidement précisé que la charge de preuve incombait à la victime (Cass Civ 2 28 mai 1986) puis posé comme définition « l’intervention (du véhicule) d’une manière ou d’une autre dans cet accident » (Cass civ2 28 février 1990).
Cette définition, parfaitement souple, n’a pas pour autant réduit les contentieux portant sur cette notion.
Un acquis s’est cependant dégagé, à savoir l’implication automatique de tout véhicule heurté qu’il soit à l’arrêt ou en mouvement (Cass Civ 2 25 janvier 1995).
La difficulté est donc circonscrite aux hypothèses d’absence de contact, dans lesquels une victime, pour être indemnisée, doit prouver qu’un véhicule en mouvement ou à l’arrêt est impliqué dans l’accident de la circulation lui ayant causé un dommage.
Pendant plusieurs années, la Cour de cassation jugeait qu’un véhicule immobile ( en l’espèce stationné) ne pouvait être impliqué que s’il perturbait la circulation (Cass Civ 2 21 juillet 1986). Cette solution a été abandonnée par un arrêt du 23 mars 1994 rendu par la même composition.
Dorénavant rien n’exclut l’implication d’un véhicule immobilier ou n’étant pas entré en contact avec une victime sous réserve qu’elle soit démontrée.
Il appartient aux juges du fonds de motiver leurs décisions pour retenir ou exclure cette notion, sous peine d’une cassation pour défaut de base légale.
L’implication est donc essentiellement une contrainte probatoire.
C’est justement cette difficulté qui concernait l’espèce soumise à la Cour de cassation.
Une automobiliste perd le contrôle de son véhicule alors qu’elle entreprenait, sur une autoroute à trois voies, le dépassement d’un véhicule qui circulait sur la voie de droite.
Avec ses sœurs, passagères blessées dans l’accident, elle assigne en indemnisation de leur préjudice corporel le conducteur du véhicule automobile dépassé et son assureur.
Aucun témoin de l’accident ni aucun élément matériel n’ayant pu être identifié, la preuve de l’implication reposait uniquement sur les déclarations de la conductrice et de ses sœurs, ce qui revenait certes à se faire preuve à soi-même, mais ce qui est possible s’agissant de la preuve d’un fait juridique ( Cass, 1ère civ, 10 mai 2005, n°02-1230)
La Cour d’appel rejette néanmoins la demande estimant que si ces déclarations sont recevables, elles sont à elles seules insuffisantes à rapporter la preuve d’une implication. La Cour de cassation confirme cette décision.
La preuve de l’implication d’un véhicule ne peut donc pas ressortir des seules déclarations d’une victime. Il est donc important de monter un dossier contenant d’autres éléments de preuves et pour lequel le cabinet MBPTD peut vous aider. A ce titre, le développement des caméras embarquées (ou dashcam) est une option.
Thibault LORIN